Les cancers désignent un groupe de maladies caractérisées par le dérèglement et la prolifération excessive de cellules devenues anormales par le fait de facteurs génétiques, de facteurs infectieux ou de l’exposition à des facteurs cancérogènes dans l’alimentation ou l’environnement. Depuis plus de vingt ans, le 4 février est consacrée Journée mondiale de lutte contre ces pathologies. En plus des journées dédiées à des cancers spécifiques, la journée mondiale contre le cancer offre l’occasion aux acteurs de la promotion de la santé et de la lutte contre la maladie de faire entendre leurs voix pour sensibiliser les populations et les décideurs sur la menace de façon générale. Le fardeau imposé aux populations par les cancers (morbidité et mortalité élevées, coûts élevés pour le dépistage et la prise en charge) requiert des actions et mesures au niveaux individuelles, communautaires et politiques.
L’organisation Mondiale de la Santé (OMS) a estimé en 2020 qu’un décès sur six dans le monde était dû au cancer. C’est donc dire que cette dernière constitue un des problèmes majeurs de santé publique au niveau global. En Afrique, la problématique du cancer est restée très longtemps au second plan, devancée par le fardeau jadis trop important des maladies infectieuses. Mais depuis quelques décennies, le développement économique et social (y compris des systèmes de santé), les transformations des modes alimentaires et des habitudes de vie ont amorcé une transition épidémiologique où les maladies non transmissibles prennent progressivement le pas sur les maladies infectieuses. En plus des maladies cardiovasculaires, des diabètes et des pathologies respiratoires chroniques, les cancers deviennent un des principaux problèmes de santé publique. Selon le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), « même si les taux d'incidence du cancer restent inchangés, la charge du cancer devrait presque doubler en Afrique subsaharienne au cours des 20 prochaines années en raison de la croissance et du vieillissement de la population, pour atteindre 1,5 million de nouveaux cas et 1 million de décès d'ici 2040 ».
Les cancers du sein, du col de l’utérus, du colon et du rectum, du foie, de la prostate et du poumon restent les plus fréquents en Afrique subsaharienne. Ceux induit par des infections chroniques (hépatite B et C, papillome humain, VIH, infections urinaires à bilharzies…) représenteraient encore 25 à 30% . Les facteurs comportementaux et environnementaux comme la consommation d’alcool et de tabac, la consommation excessive de viande rouge salée, la sédentarité et l’obésité, la pollution de l’air, de l’eau et des aliments (mycotoxine, pesticides…) et l’exposition professionnelle ou domestique à des rayonnements ionisants ou à des substances chimiques cancérigènes sont d’importants facteurs de risques de cancers en Afrique subsaharienne.
On estime que près de 40% des cancers sont évitables, car liés à des facteurs attribuables à la population. Ce qui devrait faire de la communication pour le changement de comportement, le premier axe majeur dans les stratégies de lutte contre ces maladies. Les gouvernements, les organisations de la société civile, les collectivités territoriales et les communautés doivent travailler ensemble pour renforcer la sensibilisation sur les facteurs comportementaux et l’importance du dépistage précoce, la promotion de la santé, la lutte contre les pollutions pour améliorer la qualité de l'air, de l'eau et des aliments.
La prévention du cancer en Afrique subsaharienne devrait se faire par des actions et des mesures au niveaux individuels, communautaires et nationaux pour favoriser, entre autres :
- La prévention des infections chroniques par la vaccination contre le virus de l’hépatite B et les papillomavirus humains, ainsi que l’utilisation de préservatifs pour éviter l’infection par ces virus, ainsi que le VIH ;
- La lutte contre le surpoids et l’obésité par la promotion d’une alimentation saine et la pratique d’activités physiques appropriées ;
- La limitation de la consommation de viande rouge et de la charcuterie salées, ainsi que l’alcool ;
- La lutte contre le tabagisme ;
- La protection contre les agents chimiques ou physiques cancérogènes, particulièrement en milieu de travail ;
- La promotion de l’allaitement maternel, etc.
Outre la prévention primaire, les stratégies de lutte contre le cancer doivent améliorer l’accès au dépistage précoce en sensibilisant la population, en renforçant les systèmes de santé et en rendant accessibles les tests et examens de dépistage. Enfin, l’accessibilité géographique et financière aux soins curatifs et palliatifs de qualité doit être renforcée pour réduire le fardeau du cancer sur les populations.
Par Dr Amadou Ouedraogo