Le lien entre la santé et l’environnement est connu depuis au moins l’antiquité, bien avant l’époque "pasteurienne" au cours de laquelle les causes étiologiques microbiennes de certaines maladies ont été prouvées. Déjà, au cinquième siècle avant notre ère, le médecin grec Hippocrate attribuait les fièvres à des miasmes, émanations malsaines viciant l'air que l'on respire, à la nourriture ou à l'eau que l'on ingère, aux odeurs fétides, aux marécages dégageant des vapeurs nauséabondes. Une des maladies parasitaires les plus connues et les plus anciennes est le paludisme, dont l’appellation malaria signifie « mauvais air » en référence à l’air des marécages dont les riverains étaient les principales victimes de cette maladie.

Le développement des sciences modernes, de la biologie et de la médecine va définitivement fixer le lien entre l’état de la santé des populations et leur environnement. L’essor de l’hygiène et de la médecine préventive parallèlement à l’importance qu’a prise la santé publique à entrainer l’émergence à la fin du vingtième siècle de la notion de « santé environnementale », devant l’évidence que l’environnement est un des plus grands déterminants de la santé.

Considérant que la santé est « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité » selon l'Organisation Mondiale de la Santé, la santé environnementale comprend les effets de l’environnement sur la santé (les effets négatifs, mais aussi les effets positifs). De façon classique, la santé environnementale a trait aux aspects de la santé et de la qualité de vie des populations déterminés par l’action de facteurs socioéconomiques, biologiques, chimiques et physiques de l’environnement naturel ou artificiel, ainsi que les mesures d’atténuation ou d’élimination des effets négatifs des agresseurs environnementaux.

Au Burkina Faso, comme en Afrique et partout dans le monde, le développement et les transformations anthropiques des cadres de vie, bien que comportant de nombreux effets positifs,accroissent parfois les effets néfastes de l’environnement sur la santé humaine. Le développement des villes surpeuplées avec le brassage des populations favorise la transmission de maladies bactériennes, virales ou parasitaires. Le changement comportementale qui accompagne les changements culturels et de modes de vie favorisent certaines maladies comme le VIH et d’autres IST. En Afrique et ailleurs dans le monde, le contact de plus en plus étroit avec certaines espèces animales du fait de l'invasion par l'Homme des espaces sauvages entraine l'apparition de nouvelles maladies infectieuses avec une rupture de la barrière d'espèce. L’environnement urbain mal géré est source d’insalubrité et de propagation de maladies hydriques et de maladies à transmission vectorielle comme le paludisme et la dengue.

Le développement des unités industrielles, des exploitations minières et de l’agriculture moderne exposent les habitants à diverses formes de dangers chimiques par la pollution de l’air, des sols, de l’eau et des aliments. Par exemple, l’exploitation artisanale de l’or a accru ces dernières décennies, l’utilisation du mercure qui pollue les sols, les eaux et l’air avec son corolaire d’intoxication aiguës et chroniques chez l’homme et les animaux. La généralisation de l’utilisation des pesticides et d’autres substances chimiques exposent les populations à des substances cancérogènes ou toxiques pour le système nerveux, le système cardiovasculaire, etc. L’utilisation importante des hydrocarbures du fait des modes de productions et de transports génère une pollution atmosphérique responsable de maladies respiratoires au sein des populations.

Les bruits forts ou continus surtout en ville ou sur certains lieux de travail sont une nuisance physique à l’origine de maladies auditives ou psychosociales. Les champs électromagnétiques et les rayons et radiations ionisants liés à de nouvelles technologies pourraient être liés à l’apparition de certains types de cancers.

Cette succincte énumération montre l’importance de la santé environnementale et la place qu’elle doit occuper dans la mise en œuvre des politiques publiques et dans la planification des projets et programmes, afin que précautions et préventions permettent de minimiser les effets néfastes de l’environnement sur la santé, et que le développement se fasse pour l’Homme dans un environnement qui « lui assure un état de bien-être physique, mental et social». CSE Burkina en a fait son domaine d'expertise pour sensibiliser et surtout accompagner les décideurs, les entreprises, les projets et programmes, les collectivités territoriales et les États dans l'évaluation, le conseil et l'élaboration d'outils afin que la dimension de santé environnementale soit intégrer à toutes nos initiatives de développement.

Par Dr Amadou Ouédraogo